L’EMR³, un dispositif innovant de prise en soins

L’EMR³, l’Équipe Mobile Roubaisienne de Réhabilitation et Rétablissement, est un dispositif visant à renforcer l’autonomie des usagers du secteur de Roubaix centre pour favoriser leur rétablissement. Au-delà d’une stabilisation clinique, c’est une amélioration du bien-être global de la personne qui est privilégiée, à partir de ses propres souhaits, et en fonction des dispositifs existants.

GÉNÈSE D’UN PROJET INNOVANT
« Le projet a débuté en septembre 2018, après 2 ans de réflexion collective et horizontale, impulsé notamment par le chef de pôle, Marc Debrock, et le cadre d’alors, Romuald Wuilbaux, suite à l’annonce de la fermeture de la maison thérapeutique. La volonté était de monter une équipe pluri-professionnelle, dédiée à la réhabilitation psychosociale au sein du secteur de psychiatrie de Roubaix-Centre, le 59G12 » évoque Patrice Deconstanza, cadre supérieur de santé. Le patient est ainsi adressé à l’EMR³ par son psychiatre, en lien avec ses référents soignants ou sociaux. Il bénéficie d’un entretien d’auto-évaluation de ses difficultés et besoins, qui permet de faire émerger des objectifs partagés entre la personne et l’équipe, et les moyens mis en œuvre pour les atteindre. Ce bilan peut être complété par un entretien médical, un bilan neuropsychologique et un bilan socio-éducatif. « L’usager est au centre du dispositif : l’équipe l’accompagne et l’aide à définir ses objectifs personnels à atteindre, en s’adaptant à lui. Ces objectifs peuvent concerner tous les domaines de la vie quotidienne : santé, logement, emploi, démarches administratives, mais aussi loisirs, alimentation ou vie sentimentale et sexuelle. Ils sont actés lors d’une synthèse où l’usager est incité à inviter les personnes importantes de son quotidien : famille, ami, tuteur, etc. » ajoute Julie Brancourt, praticien hospitalier. Le projet personnalisé qui en découle est coordonné par un membre de l’équipe sur le modèle du ‘’case management‘’ : il s’agit de faire le lien entre l’usager, les différents intervenants du secteur et les partenaires extérieurs pour assurer une cohérence du suivi. C’est une prise en soins spécifique et intensifiée, qui complète l’offre ambulatoire classique sur une durée limitée, avec des bilans à 3, 6 et 9 mois pour évaluer les démarches entreprises et redéfinir les objectifs en conséquence.

UNE ÉQUIPE DE COORDINATEURS TRANSVERSALE ET PLURI-PROFESSIONNELLE
L’équipe pluri-professionnelle est composée d’agents des différentes structures du G12 : infirmiers, assistants sociaux, psychiatre, neuropsychologue et éducateurs techniques spécialisés. Jan Pauwels, infirmier, confirme : « chacun peut être coordonnateur de parcours de réhabilitation, en plus d’être référent sur son propre domaine de compétences et selon ses appétences personnelles, ce qui permet de proposer une palette large de prise en soins. Nous utilisons des outils préexistants comme l’Education Thérapeutique du Patient, les activités de CATTP ou l’atelier thérapeutique, auxquels nous avons ajouté de nouveaux dispositifs de remédiation cognitive, d’entraînement aux habiletés sociales et d’aide à l’autonomisation au quotidien avec notamment 4 appartements de réhabilitation ». La force de ce projet novateur est de s’adapter réellement et personnellement au patient suivi : « nous avons, par exemple, créé un ‘’groupe de vie sociale et culturelle‘’ où les personnes décident et organisent des sorties en semaine et un dimanche par mois pendant un trimestre, et nous travaillons aussi sur un groupe de parole autour de la sexualité car c’est une difficulté souvent exprimée par les usagers sans que nous puissions proposer de réponse » complète Noémie Bonin, éducatrice technique spécialisée.

LA MOBILITÉ AU CŒUR DU PROJET
« On ne peut pas aider une personne dans sa vie quotidienne en restant enfermés dans les murs d’un CMP. Nous allons donc où elle se trouve, que ce soit au domicile ou à l’hôpital et nous l’accompagnons en ville en fonction de ses besoins, de ses envies et des structures qu’elle fréquente » déclare Christopher Jon, infirmier. L’objectif est donc de sortir avec l’usager des lieux de soins habituels, ces lieux deviennent alors des partenaires parmi d’autres. L’équipe a à cœur de tisser également des liens avec différents partenaires comme le GEM, les ESAT, les centres sociaux ou des associations locales par exemple. De plus, l’équipe elle-même est composée de professionnels qui exercent sur différentes structures et ont des réseaux professionnels variés, ce qui permet d’enrichir les partenariats avec les structures médico-sociales et les échanges avec d’autres équipes de réhabilitation psychosociale comme celles du CHU de Lille, de la MGEN ou de l’EPSM Lille-Métropole.

DES PATIENTS DEJA SUIVIS ET EN DEMANDE D’AUTONOMISATION
L’EMR³ s’adresse à des patients du secteur et relativement stabilisés sur le plan clinique. Ils peuvent être en tout début de suivi ou connus depuis longtemps, quelle que soit la pathologie. Stéphane Dely, assistant de service social, précise : « nous n’avons pas de critères de sélection particuliers hormis la propre demande de l’usager, qui est indispensable. Celle-ci peut être préexistante, spontanée, mais nous pouvons aussi aider à la faire émerger ». Aujourd’hui l’EMR³ est un dispositif interne au G12 qui ne concerne que les patients du secteur. Mais les membres de l’équipe ont l’espoir de le mettre en commun avec ce qui existe dans d’autres secteurs roubaisiens, pour devenir un centre de proximité de réhabilitation psychosociale intersectoriel habilité par l’ARS.

UN BILAN DÉJÀ POSITIF ET PROMETTEUR
« Cette première année était un peu expérimentale. Nous avons dû repenser notre organisation, notamment pour les infirmiers qui sont à mi-temps sur cette équipe. Une trentaine de personnes nous ont été adressées, dont vingt ont intégré le dispositif. Nous arrivons aux premiers bilans individuels de sortie ce qui nous permet de réajuster certains points » explique Romuald Parzys, cadre de santé. Dans le même temps l’équipe continue à initier de nouvelles activités au fur et à mesure, comme les groupes de remédiation cognitive, pour lesquels il faut du matériel et des formations. Durant cette année, tous les membres ont pu bénéficier d’une formation à la réhabilitation psychosociale et d’initiation à la remédiation cognitive, et participer à des conférences et colloques, pour rencontrer d’autres équipes. « Maintenant que le dispositif est structuré, nous souhaitons l’améliorer pour répondre aux critères de l’ARS et l’HAS. Nous voulons aussi développer les échanges avec les autres secteurs de l’établissement qui pratiquent la réhabilitation psychosociale, et pourquoi pas organiser des formations ou d’autres initiatives communes afin d’améliorer et promouvoir nos pratiques », conclut Marie-Sophie Robin, neuropsychologue.

LES MEMBRES DE L’EMR³ 
Noémie Bonin, éducatrice technique spécialisée ; Julie Brancourt, praticien hospitalier ; Patrice Deconstanza, cadre supérieur de santé ; Stéphane Dely, assistant de service social ; Alexandra Doctrinal, infirmière ; Stéphanie Duraisin, assistante de service social ; Anna El-Jammal, infirmière ; Muriel Gration, infirmière ; Samira Haili, infirmière ; Christopher Jon, infirmier ; Romuald Parzys, cadre de santé ; Jan Pauwels, infirmier ; Antoine Retailleau, éducateur technique spécialisé ; Marie-Sophie Robin, neuropsychologue.