Frédéric Mitterrand - AE #07

Interview réalisée par les Z’entonnoirs

Emus et contents de rencontrer en mars dernier Frédéric Mitterrand, Ministre de la Culture, dans son bureau au Palais Royal à Paris, les Z’entonnoirs commentent : « Un endroit chaleureux, avec une fresque bleu et un éclairage qui vient d’en bas, les miroirs qui réfléchissent une perspective infinie si vous regardez par la caméra » « Sympa, on aimerait bien y vivre ici… un petit loft pour les Z’entonnoirs en plein Paris » « C’est super car on touche le tapis c’est doux, c’est bien, il n’y a pas de poussière » « Des lumières qui imitent des flammes de bougies, c’est en endroit superbe… »

Vous remettez une médaille de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres à Erika Schröder, quel sens cela a pour vous ?

J’essaye de rapprocher l’action du ministère de la culture des gens, des associations, des fanzines, des quartiers, des personnes qui amènent à la culture des publics qu’on dit empêchés, qui sont intimidés par la culture en général. Des gens comme Madame Schröder y contribuent. (…) Et puis on dit toujours que les gens n’ont pas de pratiques culturelles mais en fait ils en ont : il faut aussi se demander si nous nous rapprochons assez d’eux. C’est le sens de cette remise de médaille. Le problème de l’accès à la culture marche dans les deux sens ; tous ceux qui vont recevoir la médaille aujourd’hui sont de ceux qui permettent que cela marche dans les deux sens c’est pourquoi ils sont indispensables. (…) Ils n’ont pas cherché des décorations dans ce qu’ils font, mais cette décoration est un signe de reconnaissance de la République, de la citoyenneté. Quand on le regarde sous cet aspect, il faut reconnaître ce que c’est : un geste de gratitude de la République à leur égard. La République leur doit la reconnaissance, l’encouragement, le respect. La décoration est une forte marque de respect. 

« Si je vous dis que c’est génial le concept des Z’entonnoirs vous allez penser que je suis démagogue, mais c’est pourtant vrai : je trouve que c’est génial les Z’entonnoirs, et je suis très content de vous avoir. »

Qu’est-ce que vous avez à dire sur le handicap mental ?

Le mot qui me gêne là-dedans c’est « mental », je ne sais pas ce que ça recouvre. Ca a à voir avec l’intelligence or on ne parle pas de troubles de l’intelligence. Je dirai plutôt : « difficultés psychologiques ». Je le dirai d’autant plus que moi j’en ai eues, comme tout le monde. J’ai des souvenirs d’un désarroi personnel qui a été extrêmement difficile. D’ailleurs j’ai fait une analyse qui m’a beaucoup aidée pendant deux ans. Ce n’est pas beaucoup, deux ans. Je suis d’ailleurs parti de l’analyse sans payer mes deux dernières séances… j’ai compris que c’était une manière pour moi de laisser l’analyse ouverte ( …). Je sais qu’il y a des troubles qui sont si lourds qu’ils handicapent la relation sociale gravement. On est obligé d’avoir recours à des traitements, à l’époque j’avais du Tranxène, c’était le fait de l’avoir qui me rassurait et un jour je l’ai oublié. Peut-être que la détresse que j’avais aurait pu devenir plus sévère et à ce moment-là elle m’aurait handicapée, mais j’ai eu la chance que cela arrive alors que je commençais à faire de la télévision et j’ai eu la chance d’avoir un mécanisme créatif. Je crois que la création est une manière de prendre en charge les difficultés que l’on a et d’en faire quelque chose d’autre. Il n’y a pas de situation sans issue.

Que pensez-vous de l’association entre la santé mentale, la culture et la citoyenneté ?

En cas de difficulté psychologique et de désarroi très puissant, la pratique culturelle (c’est large) permet déjà de se relier aux autres et la pratique artistique, dans le cadre de la pratique culturelle, permet de dépasser, de construire avec les difficultés que l’on a, quelque chose qui vous aide, et que l’on partage. Et à partir de ce moment-là la citoyenneté vient naturellement car on est dans un processus de reconstruction.

Que retiendrez-vous de votre expérience au sein du Ministère de la culture ?

Tous les petits signes qui m’ont été donnés du besoin de culture qu’il y a chez tous les êtres humains. Je reprendrai ma vie, j’écrirai des livres et je lirai. Ce sera sans doute difficile psychologiquement, ce sera un changement de vie, je ne vais pas retourner exactement à la case départ, j’aurais un truc en plus ou un truc en moins….

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