Professeur Michel Lemay - AE #15

Michel Lemay est pédopsychiatre, Directeur de la clinique de l’autisme et des troubles envahissants du développement de l’hôpital Ste Justine à Montréal et Professeur titulaire au Département de psychiatrie de la faculté de médecine de l’Université de Montréal. Il est aussi auteur de nombreux ouvrages en pédopsychiatrie : « J’ai mal à ma mère » et il vient de publier « Forces et souffrances psychiques de l’enfant » aux éditions Erès. Interview avec le Docteur Patricia Do Dang.

La sectorisation à la française est-elle appliquée au Québec ?
Au Québec, la psychiatrie est sectorisée mais cela ne fonctionne pas bien : les Canadiens ne restent pas longtemps dans la même habitation, dans le même secteur surtout lorsqu’on habite dans les grandes villes.

Quelle est la continuité de la prise en charge au Québec ?
Je me bats depuis 40 ans pour qu’il y ait une stabilité et une sécurité des soins au Québec. Mais la continuité des soins est une notion qui passe assez difficilement au Canada. On demande de plus en plus de faire des soins intensifs et de courte durée en 10 séances de psychothérapies. Je nuance quand même rétrospectivement aujourd’hui : on gardait les sujets trop longtemps. Or, plus on connaît quelqu’un, plus on a tendance à le voir fragile et donc à le garder.

Faut-il mieux définir les missions de la pédopsychiatrie face à une société qui évolue ?
Oui. Par exemple, la pharmacologie infantile est en train de prendre une place grandissante, qui à la fois me paraît avoir certains intérêts mais en même temps me fait peur. Quand on sait le désir que l’on peut avoir de modeler l’enfant selon ses propres projets de vie et selon des désirs conscients et inconscients et
qu’on constate qu’effectivement des molécules sont capables de modifier les personnalités ou les comportements, il est bien tentant, de prescrire de la ritaline et « point ». Je crois à la ritaline mais pas « point ». Il ne faut pas nous crisper sur des éléments nouveaux que ce soit en pharmacologie, en approches cognitivo-comportementales, où je vois des choses très troublantes où des sujets phobiques qui effectivement après 7/8 séances d’approches cognitives comportementales, voient disparaître leurs phobies. Mais en même temps, attention de ne pas tomber dans les mirages des molécules, dans les mirages des approches quantitatives et statistiques et dans les mirages des thérapies qui en 5, 6, 7 séances pourront faire un miracle. Il y a quelque chose entre les deux
qu’il faut trouver et qui je crois va nous amener à redéfinir ce qu’est un pédopsychiatre mais aussi ce qu’est un psychologue.

Avez-vous les mêmes débats sur l’autisme au Québec qu’en France ?
Au Québec, il s’est créé des CRDI (Centres de Réadaptation pour Déficience Intellectuelle) qui accueillent les adultes et les enfants. Dans ces CRDI, il s’est créé des sections pour enfants autistes. Ça a donc amené progressivement à la fermeture des services de soins de jour de longue durée pour les enfants autistes avec toute l’ambivalence que vous pouvez penser que cela peut créer en nous. Nous sommes dans une situation où l’autisme devient un « fourre tout ».
Il y a 30 ans lorsqu’on annonçait aux parents que leur enfant était autiste c’était un effondrement. Maintenant, quand on annonce que l’enfant est en difficulté, les parents nous disent : « mettez le autiste et nous bénéficierons ainsi des approches individualisées de 20 h par semaine et en plus, si besoin, il aura accès à
des classes spécialisées.
» D’où une augmentation du nombre d’autistes de 3,5 pour 10 000 à 1% à l’heure actuelle. Ce qui montre que lorsque l’on sensibilise une population à un syndrome, on augmente la population de ce syndrome.

Les enfants sont soumis très précocement à un bombardement sensoriel ; est-ce que les nouveaux syndromes ne seraient pas des mécanismes adaptatifs ?
Lorsque je fais du psychodrame avec les enfants, je constate que l’imaginaire est beaucoup plus pauvre qu’il y a une vingtaine d’années alors je m’étais dit « oh la Michel tu fais de la nostalgie de vieillissement ! », mais j’ai filmé ! Donc je constate que non, c’est vrai, ce qu’ils nous demandent maintenant c’est de jouer à des situations d’efficacité comme Mario Bros… Ce n’est pas drôle de jouer à Mario Bros en psychothérapie ! Et ça n’ouvre pas beaucoup sur l’imaginaire ! Et il y a une véritable rééducation de l’imaginaire à faire. C’est très étrange de voir le jeune qui est très heureux par la suite.

La suite de l'interview en mp3 :

1-Comment fonctionne la pédopsychiatrie au Canada ? (extrait de 12 minutes)

2-Les soins primaires coordonnés par un pédopsychiatre (extrait de 1 minute)

3-Comment fonctionne la sectorisation au Canada ? (extrait de 3 minutes)

4-La continuité des soins au Québec (extrait d’environ 5 minutes)

5-Qui a décidé qu’une thérapie pouvait se faire sur une courte durée ? (extrait de 3 minutes)

6-Les pédopsychiatres au Canada sont-ils en crise identitaire ? Faut-il mieux définir les missions face à une société qui évolue ? (extrait de 10 minutes)

7-L’évolution de la notion de l’autisme (extrait de 18 minutes)

8-Est-ce qu’il y a véritablement une structure prépsychotique qui est différente de la structure autistique ? (extrait de 2 minutes)

9-Le droit de penser différemment est un acquis indiscuté au Canada, comment expliquer les polémiques violentes autour de l’autisme ? (extrait de 12 minutes)

10-Est-ce que vous pensez que la pédopsychiatrie française est moins ouverte que celle au Canada ? (extrait de 4 minutes)

11-Que pensez-vous des réactions très vives face aux adoptions pour les couples homo parentaux ? (extrait de 3 minutes)

12-Y a-t-il une méconnaissance de la structure des enfants autistes dans la psychiatrie anglo-saxonne, parce qu’ils n’en sont pas profondément imprégnés dans des suivies ? (extrait de 4 minutes)

13-Le déménagement permanent des canadiens ? (extrait de 2 minutes)

14-D’après votre dernier ouvrage, tous les nouveaux syndromes ne seraient-il pas finalement des mécanismes adaptatifs ? (extrait de 6 minutes)

15-Le phénomène du web chez les adolescents (extrait d’une minute)

16-Nécessité d’intégrer le religieux dans la compréhension de l’enfant. Est-ce quelque chose que nous ne faisons pas souvent et que justement au Canada avec les nombreuses religions, il y a cet intérêt ? (extrait de 5 minutes)

17-La psychose symbiotique a-t-il toujours sa place ou est-on envahi petit à petit par l’autisme tout entier dans ses classifications ? (extrait de 8 minutes)

18-Cette difficulté à dépasser un stade de stimuli serait-il un point commun chez les autistes ? (extrait de 3 minutes)

19-Cette difficulté est-elle communes à l’autisme et à la psychose ? (extrait de 2 minutes)

 

Interview Professeur Michel Lemay

  • Itw Michel Lemay - 01
    Durée totale › 11 : 39
  • Itw Michel Lemay - 02
    Durée totale › 00 : 50
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    Durée totale › 02 : 36
  • Itw Michel Lemay - 04
    Durée totale › 04 : 04
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    Durée totale › 02 : 32
  • Itw Michel Lemay - 06
    Durée totale › 10 : 12
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    Durée totale › 18 : 22
  • Itw Michel Lemay - 08
    Durée totale › 02 : 11
  • Itw Michel Lemay - 09
    Durée totale › 01 : 27
  • Itw Michel Lemay - 10
    Durée totale › 02 : 34
  • Itw Michel Lemay - 11
    Durée totale › 02 : 24
  • Itw Michel Lemay - 12
    Durée totale › 03 : 39
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    Durée totale › 03 : 33
  • Itw Michel Lemay - 19
    Durée totale › 02 : 57

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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